Les stéroïdes topiques sont parmi les traitements les plus prescrits pour l’eczéma, le psoriasis et les dermatites. Ils agissent directement sur la peau pour calmer l’inflammation, sans toucher tout le corps comme les comprimés. Mais si on les utilise mal, ils peuvent affaiblir la peau - et ce n’est pas une menace mineure. Beaucoup de gens les prennent comme une solution rapide, sans comprendre que la dose, la durée et l’endroit où on les applique changent tout.
Comment fonctionnent les stéroïdes topiques ?
Les stéroïdes topiques, aussi appelés corticostéroïdes, sont des médicaments appliqués directement sur la peau. Leur but : réduire l’inflammation, la rougeur et les démangeaisons. Contrairement aux stéroïdes pris par la bouche, ils sont conçus pour être absorbés en très faible quantité dans le sang. La peau les métabolise presque entièrement, ce qui limite les risques d’effets secondaires systémiques comme l’affaiblissement des glandes surrénales.
Leur efficacité vient de leur capacité à cibler précisément la zone touchée. Un stéroïde appliqué sur un pli du coude réduit l’eczéma là où il est, sans affecter les poumons ou le foie. C’est pourquoi les dermatologues les considèrent comme la première ligne de traitement pour les affections cutanées inflammatoires.
Les stéroïdes ne sont pas tous les mêmes
Il existe sept niveaux de puissance, de très faible à très fort. Le choix dépend de l’endroit où vous les appliquez et de la gravité de votre affection. Les crèmes et les onguents sont les plus courants. Les onguents, plus gras, sont plus puissants et idéaux pour la peau sèche et épaisse, comme les mains ou les pieds. Les crèmes conviennent mieux aux zones humides ou qui suintent. Les gels et lotions sont préférés pour les plis de la peau ou les zones poilues. Les mousses, elles, sont pratiques pour le cuir chevelu.
Sur le visage, les paupières, les aisselles ou l’aine, seul un stéroïde de faible puissance est autorisé. Un stéroïde fort appliqué sur ces zones fines peut provoquer une atrophie cutanée - c’est-à-dire un amincissement visible de la peau, qui devient translucide, fragile, et se déchire ou bruise facilement. Sur les paupières, un usage prolongé peut même augmenter le risque de cataracte ou de glaucome.
Combien en mettre ? La règle des unités du bout du doigt
La plupart des gens utilisent trop ou trop peu. Et les deux sont dangereux. Trop peu ? Cela prolonge la maladie. Trop ? Cela augmente les risques d’effets secondaires.
La solution : l’unité du bout du doigt (UBD). Une UBD correspond à la quantité de crème ou d’onguent étalée du bout du doigt jusqu’à la première pliure. Cela fait environ 0,25 à 0,5 gramme - selon les sources. Ce n’est pas beaucoup. Pour une main entière (devant et derrière), il faut une UBD. Pour un bras complet, trois UBD. Pour une jambe entière, six UBD. Pour le visage et le cou, deux UBD suffisent.
Beaucoup de patients pensent qu’il faut en mettre une couche épaisse. C’est faux. Une fine couche, bien étalée, suffit. Il faut masser doucement jusqu’à ce que la peau l’absorbe. Pas de grattement. Pas de frottement excessif. Et surtout, lavez-vous les mains après application - sauf si vous traitez vos mains.
Combien de temps ? La règle des deux semaines
Un stéroïde fort ne doit jamais être utilisé plus de deux semaines d’affilée. Même si la peau semble encore rouge, il faut arrêter ou passer à un produit moins puissant. Les dermatologues appellent cela la « méthode de dégression » : commencer fort pour calmer l’attaque, puis réduire progressivement.
Par exemple : si vous avez une poussée d’eczéma sur les bras, vous utilisez un stéroïde de puissance moyenne pendant 10 à 14 jours. Ensuite, vous passez à un stéroïde faible, puis à une crème hydratante simple. Ce n’est pas une faiblesse - c’est une stratégie. Les études montrent que les patients qui suivent cette méthode ont moins de rechutes et presque pas d’amaigrissement cutané.
En revanche, ceux qui utilisent un stéroïde fort pendant des mois, souvent sans avis médical, développent des stries (vergetures), une peau translucide, ou même des réactions de sevrage : une rougeur intense, des démangeaisons, des brûlures qui reviennent quand on arrête. Ces cas sont de plus en plus fréquents sur les forums de patients, surtout chez ceux qui traitent l’eczéma chronique par eux-mêmes.
Les alternatives aux stéroïdes
Il existe des traitements non stéroïdiens, comme le crisaborole ou le tacrolimus. Ils sont particulièrement utiles sur le visage, les paupières ou les plis. Ils ne causent pas d’amaigrissement de la peau. Mais ils sont plus chers, et leur effet est plus lent. Ils ne remplacent pas les stéroïdes pour les poussées aiguës, mais ils sont excellents pour le maintien à long terme.
Les dermatologues les utilisent de plus en plus pour les enfants, les personnes âgées, ou celles qui doivent traiter une zone sensible sur plusieurs mois. Leur avantage ? Pas d’effet d’accumulation. Pas de dépendance. Pas de peau fine.
Et les émollients ? Comment les combiner
Les émollients - c’est-à-dire les crèmes hydratantes - sont essentiels. Mais ils ne doivent pas être appliqués en même temps que le stéroïde. Si vous mettez la crème avant, elle empêche le stéroïde d’être absorbé. Si vous le mettez après, vous diluez son effet.
La bonne méthode : appliquez le stéroïde sur la peau sèche. Attendez 20 à 30 minutes. Ensuite, appliquez votre émollient. Cela permet au médicament de pénétrer en profondeur, tout en protégeant la barrière cutanée. C’est une étape souvent oubliée - et pourtant, elle fait toute la différence.
Les pièges courants
Voici les erreurs les plus fréquentes :
- Appliquer un stéroïde fort sur le visage ou les paupières
- Utiliser un stéroïde plus de 2 semaines sans avis médical
- Appliquer plusieurs fois par jour, pensant que ça marche mieux
- Utiliser une quantité trop importante, comme une couche de pâte
- Ne pas utiliser d’émollient, ou le mélanger au stéroïde
- Continuer à utiliser le stéroïde même après la disparition des symptômes
La plupart des effets secondaires viennent de ces erreurs. Pas du médicament lui-même. Les études montrent que les patients qui reçoivent des instructions claires, une quantité exacte, et un suivi régulier ont très peu de complications.
Que dit la réglementation ?
En Europe, les emballages des stéroïdes puissants portent un avertissement clair sur le risque d’amaigrissement de la peau. Aux États-Unis, la FDA a mis à jour ses exigences en 2021 pour exiger le même type d’étiquetage. Au Royaume-Uni, le NHS publie des guides détaillés pour les patients, avec des schémas montrant exactement combien de UBD utiliser pour chaque zone du corps.
Malgré cela, les généralistes prescrivent encore parfois des stéroïdes trop forts ou trop longtemps. Les dermatologues, eux, suivent les protocoles à 85 %. Le problème, c’est que beaucoup de patients ne voient pas un dermatologue - ils achètent un stéroïde en pharmacie sans ordonnance, ou reprennent une vieille boîte de leur armoire à pharmacie.
Le futur des traitements
Les chercheurs travaillent sur de nouvelles formules qui ciblent l’inflammation sans toucher à la structure de la peau. Des systèmes de livraison plus intelligents, des gels à libération contrôlée, des molécules qui agissent uniquement sur les cellules inflammatoires. Mais ces innovations sont encore en phase expérimentale.
Pour le moment, les stéroïdes topiques restent indispensables. Leur avantage est incontestable : rapide, efficace, peu coûteux. Leur seul défaut ? On les utilise mal. Le vrai progrès ne viendra pas d’un nouveau médicament, mais d’une meilleure éducation. Comme le dit un dermatologue : « Le futur n’est pas d’arrêter les stéroïdes, mais de les utiliser plus intelligemment. »
Les stéroïdes topiques peuvent-ils rendre la peau fine de façon permanente ?
Oui, mais seulement si on les utilise mal. L’amaigrissement cutané (atrophie) est réversible dans la plupart des cas, à condition d’arrêter le traitement et de laisser la peau se régénérer. Cela peut prendre plusieurs mois. Si vous continuez à utiliser un stéroïde fort après l’apparition de signes d’amaigrissement - peau translucide, vergetures, ecchymoses faciles -, les dommages peuvent devenir permanents. Le risque est plus élevé sur les zones fines : visage, aisselles, plis, paupières.
Puis-je utiliser un stéroïde sur mon visage ?
Seulement si c’est un stéroïde de faible puissance, et seulement pour une courte période - généralement pas plus de 5 à 7 jours. Les stéroïdes moyens ou forts sur le visage peuvent provoquer une dermatite périorale (petites boutons rouges autour de la bouche), de l’acné, ou des changements de pigmentation. Sur les paupières, ils augmentent le risque de cataracte ou de glaucome. Si votre visage est irrité, demandez à votre médecin un traitement non stéroïdien comme le tacrolimus.
Combien de fois par jour dois-je appliquer le stéroïde ?
Une fois par jour suffit, même pour les stéroïdes forts. Appliquer deux fois par jour n’améliore pas l’efficacité - ça augmente seulement le risque d’effets secondaires. Cette règle est valable pour tous les stéroïdes, y compris ceux de faible puissance. Les études montrent qu’il n’y a aucun bénéfice à les appliquer plus souvent. Le corps a besoin de temps pour métaboliser le médicament.
Que faire si j’ai utilisé un stéroïde fort trop longtemps ?
Arrêtez immédiatement. Ne remplacez pas le stéroïde par un autre sans avis médical. Consultez un dermatologue. Il vous guidera vers un protocole de dégression : passer à un stéroïde plus faible, puis à un émollient. En attendant, évitez les irritants (savons agressifs, parfums, eau chaude). La peau peut se rétablir, mais cela prend du temps - parfois plusieurs mois. Si vous avez des symptômes de sevrage (rougeur intense, brûlures, démangeaisons), un traitement médical peut être nécessaire pour les gérer en douceur.
Les enfants peuvent-ils utiliser des stéroïdes topiques ?
Oui, mais avec plus de précautions. Les enfants ont une peau plus fine, donc plus sensible. On utilise uniquement des stéroïdes de faible à moyenne puissance, et seulement pour les périodes courtes. Les crèmes sont préférées aux onguents. Le nombre d’UBD est ajusté à la taille de l’enfant. Un stéroïde fort ne doit jamais être utilisé sur un enfant sans suivi médical. Les parents doivent toujours vérifier la puissance du produit et respecter les doses. Les études montrent que les enfants traités correctement n’ont pas de complications à long terme.